[Chroniques]

Publié le par Métastases

The XXEponyme
par Domino

http://martinflamand.files.wordpress.com/2010/01/xx.jpgThe XX, le groupe hype du moment. Celui que tout le monde adore, comme si la révélation tant attendue depuis des années était incarnée par ce groupe sorti de nulle part. Mais c'est ce même groupe que les anti hype détestent presque par principe, parce qu'il est hype (paradoxe) justement de cracher dans la soupe. Alors, The XX, pétard mouillé ou réelle révélation ?

Soyons honnête d'entrée de jeu, ça a quand même beaucoup d’éléments proches du pétard mouillé. Grosse problématique, était-il obligatoire d'être quatre pour aboutir à ça ? Les membres auront bien compris que non et Baria, la claviériste et deuxième guitariste quittera le groupe peu après la sortie de l'album pour cause d'extrême fatigue (ce qui ne devait pas être à cause de leur musique). Car la musique de The XX est des plus minimalistes et simplistes. Est-ce un mal ? Pas vraiment non, l'efficacité n'est pas forcement dans la complication et les meilleures pistes de cet album le prouvent. « Crystallised » et son ambiance de fin de nuit d'ivresse ultra planante, « Shelter » où Romy la chanteuse se fait terriblement sensuelle, « Basic space » habile renvoi de balle entre cette même Romy et Oliver, le bassiste, la rejoignant au chant, et enfin « Night time », petit bijou de mélancolie, chef-d'œuvre de l'album, impossible à décrocher de la tête. Voilà les titres où se trouve le « génie » du groupe. Quatre titres savamment composés, riches d’émotions et installant un climax froid et noir qui ravira les amateurs. Quatre titres accrocheurs donc, c'est peu. Surtout quand le reste est invariablement… chiant.

« Heart skipped beat » comme « Fantasy » et « Infinity » semble interminable et il faudra lutter pour terminer leur écoute. Le reste navigue entre le fade et le sympatoche. The XX est la première expérience musicale du combo et ça se ressent. Certaines mélodies tournent très vite en rond et on se surprend même à installer un petit jeu lors de l’écoute, tentant de deviner comment le morceau va se poursuivre. On sera alors bien déçu de se rendre compte qu’il est facile de prévoir la chute de beaucoup d’entre eux, les membres semblant assez limités instrumentalement. Y a-t-il alors ce fameux génie dans ces gens-là, celui dont on nous a assez rabattu les oreilles ? On en doute, le groupe semblant encore bien jeune. Si celui-ci peut sembler charmeur, de ce premier opus, on ne retiendra que quelques pistes, nageant au milieu de pistes honorables juste à coté d’autres vraiment poussives.

Le constat ? Peut mieux faire, les prestations du combo allant d’ailleurs dans ce sens, celles-ci étant très loin de l’inoubliable. À surveiller peut-être, pour tous ceux qui se seront laissés charmer par les quatre meilleures pistes, qui pourraient laisser bon espoir pour la suite. Pour les autres, vous trouverez certainement mieux ailleurs.

The XX, Eponyme, sorti en aout 2009 chez Young Turks
Myspace

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EsieBehind my skin
par Arno Mothra

http://img7.hostingpics.net/pics/228236esie.jpgIl y en a qui méritent des claques, voire un bon coup de pied au cul pour regarder la réalité en face. À croire pour certains qu’il faudrait se contenter de s’habiller en noir pour se revendiquer gothique ou de jouer les pseudo rebelles pour se prétendre punk. La bonne blague. Voilà exactement à quoi inspire la belle Esie avec son EP Behind my skin.

Alors déjà, la présentation de l’artiste irrite et consterne. Pour ne pas attenter au ridicule (!), la dame de 21 ans est ainsi introduite : « Pas étonnant que ses nombreux fans sur Myspace la comparent à une multitude d’artistes de la même veine : Björk, Nina Hagen, Joy Division, Bauhaus, Siouxsie & The Banshees, Brian Eno, New Order, Eurythmics, Depeche Mode, ou encore Marilyn Manson… » Oh, quelle humilité. Non, vous ne rêvez pas : la nana encore en position de fœtus dans un bide plutôt sec se permet déjà des comparaisons avec ceux qui ont réinventé la musique (et qui sont pour certains toujours dignement présents trente ans après leurs débuts) ; ça promet. Forcément, ça donne envie d’écouter Esie, au moins pour lui taper dessus.

À ce stade, on optera pour un tonfa ou une matraque plombée, parce que là c’est vraiment l’horreur. En premier lieu, il faudra nous préciser où trouver la new wave et le punk dans ce rock certes efficace mais convenu et trop entendu ; ça fait belle lurette qu’il ne suffit plus à intégrer des parties électroniques pour paraître un minimum original, surtout lorsque les compositions n’apportent strictement rien. Behind my skin alterne entre larmoyance dégoulinante (« I will not sing in the rain ») et rock plus péchu et électro (« Under my body »), mais le problème, c’est qu’on n’en retient pas grand-chose après écoute. Il y a pourtant de bonnes idées (« Invasion ») et Esie, en plus d’être très mignonne, a une voix bien particulière (quoique vite agaçante) ; sauf que ça ne fait pas tout.

On apprendra à cette jeune fille que l’idée du mouvement punk n’est pas compatible avec celle de s’exhiber pour des marques et jouer au mannequin pour s’enrichir. Le punk n’est pas mort ? Sans doute, mais Esie n’a rien à voir dans le coup, l’Oréal non plus par la même occasion : on optera davantage pour Sexy Sushi par exemple. En clair, voilà donc une grosse escroquerie comme il en pullule (malheureusement) avec abondance sur le web, mais qui n’a ici pas même le mérite d’amuser. Sans intérêt. Les greluches fascinées par les nouvelles icônes du vide devraient cependant trouver matière à festoyer.

Esie, Behind my skin EP, disponible en téléchargement légal
Myspace

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CocorosieGrey oceans
par Domino

http://img7.hostingpics.net/pics/498333cocorosie.jpgUn rêve. C'est ainsi que pourrait être défini le plus justement ce nouvel album du duo Cocorosie. Inclassable, riche en sons envoûtants, en sensations inédites, l'album s'impose de lui-même comme un indispensable, peut-être même le meilleur album du duo, laissant un ressenti difficilement descriptible après l’écoute. Comme si l'on ressortait d'un rêve qu'on ne réaliserait pas, qu'on ne comprendrait qu'à moitié. Récit d'un parcours aérien dans un monde qui ne l'est pas moins.

« Trinity's crying » est une intro parfaite, nous plongeant d'emblée en terrain connu. Le titre s’étend sur environ cinq minutes, durée idéale pour nous laisser nous installer dans l'univers des deux sœurs en douceur. « Smokey taboo » enchaîne et opère son charme, assurément. Les voix des demoiselles, portées par un tambour amérindien, semblent surgir de partout à la fois, comme si elles nous susurraient les paroles dans notre propre tête. « Hopscotch » suit et l'on se sent déjà comme engourdi, prêt à plonger corps et âme dans ce qui s'offre devant nous.

On pense parfois à Björk à l'écoute de cet album, le tout ayant un goût d'exotisme et de pureté qui n'est pas étranger à l'univers de l'Islandaise. Mais les sœurs marquent leur identité à travers nombre de passages bien propres à leur univer. « Undertaker » s'introduit par un chant cherokee pour ensuite nous plonger dans une mélancolie délectable, soutenue par un piano du plus bel effet. Les voix se font tantôt enfantines, tantôt irréelles, mais toujours justes et pleines d'émotion. « Grey oceans » et « R.I.P burn face » offrent des couleurs variées, comme mille invitations au voyage là où « The moon asked the crow » prend des allures de hip-hop complètement psyché. « Lemonade » et « Gallows » offrent des chemins teintés à nouveau de mélancolie et de poésie laissant le final nous saisir une dernière fois à travers les douces nuances électro de « Fairy paradise » et le ‘gospel’ halluciné de « Here I come » finir l'album.

Un délice, un rêve. Un délicieux rêve pourrait-on dire. Cet album est une petite perle, une sorte de coffre précieux empli d'une magie qu'il convient de déguster à petites doses, seul, comme un péché mignon. Malgré le fait que certains titres semblent peut-être un peu longs, la magie opère sans mal sur l'ensemble du disque et c'est le sourire aux lèvres, presque un peu engourdi par un charme qu'on ne saura pas définir, qu'on quitte l'univers des deux sœurs, avec une seule envie : celle d'y revenir.

Cocorosie, Grey oceans, sorti le 3 mai 2010 chez Sub Pop
Myspace

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The Omar Rodriguez Lopez QuartetSepulcros de miel
par Domino

http://img7.hostingpics.net/pics/581995cover_OMAR_RODRIGUEZ_LOPEZ.jpgQuestion : je suis hyperactif, je sors 1500 albums l'année et à ce rythme-là ma discographie sera bientôt plus difficile à suivre que celle de John Zorn. Je suis un petit latino qu'on compare parfois à Jimmy Page, fraîchement acoquiné de l'ancien guitariste des Red Hot Chilli Peppers, je suis, je suis ? Omar Rodriguez Lopez en effet. C'est à peine quelques semaines après son premier album avec John Frusciante que déboule ce second opus, toujours accompagné du maître plus de quelques invités, permettant à cet ensemble de se renommer habilement The Omar Rodriguez Lopez Quartet… Pourquoi pas?

On aurait pu craindre la redite, un truc fait à la va-vite un peu du genre : « Bon on a sûrement des pistes qui ont pas servi sur l’album précédent non ? On va mettre ça sur un album et voilà », Omar ayant déjà avoué travailler un peu comme ça d’ailleurs. Seulement non, rien à voir. Ici le Omar Rodriguez Lopez Quartet prend le parti ô combien risqué de tenter le coup de l'album à morceau unique. C'est donc huit parties d'un seul et unique morceau de folie qui s'enchaîneront pour le plus grand plaisir de l'auditeur. Et de la folie et du plaisir, il y en a. « Part I » ne laisse aucunement présager la teneur de l'ensemble, naviguant dans une sorte de beat minimaliste électro. « Part II » ouvre donc véritablement le bal à travers un son free jazz guidé par une rythmique impeccable de groove et de maîtrise, laissant les guitares d'Omar et de John se réveiller doucement, accompagnées d'ambiances électro du plus bel effet. « Part III » aurait pu nous emmener vers un réveil explosif des deux guitaristes mais décide plutôt de nous laisser assister à un nuancement savamment dosé de l'ensemble. Omar et John se répondent tour à tour de belle manière, dévoilant tout leur talent et toujours soutenu par cette rythmique impeccable qui ferait presque oublier l'incroyable batteur de l'autre groupe d'Omar. L'ensemble du groupe offre une prestation éblouissante qui semble atteindre un premier sommet lors de « Part IV », où chaque seconde défilant transporte toujours un peu plus loin.

Arrivé à la moitié du disque, on reste impressionné par la fluidité de l'ensemble. Qui aujourd'hui peut se vanter de réussir ce genre de prouesse musicale ? L'ennui ne s'installe à aucun moment, chaque instant, chaque partie venant sublimer la précédente. « Part V » nous offre une petite accalmie riche d'ambiances éthérées, laissant plus en retrait les deux guitaristes avant de repartir faussement, par vagues successives, sur la partie suivante. On glisse alors vers la septième partie sans s'en rendre compte, comme on arrive alors à la fin de l'album dans un vacarme mélodique puissant, avant de laisser place à nouveau à ce beat électro du premier morceau, histoire de boucler la boucle et ce, sans que le temps n'ait eu une quelconque emprise sur quoi que ce soit pendant l'écoute.

Une belle claque que cet album. Dix fois plus abouti que le précédent (qui faisait office d’apéritif) réalisé avec John également, ce Sepulcros de miel s'avère être sûrement l'une des plus belles réalisations du sieur Rodriguez Lopez. Puissant, terriblement addictif (il sera difficile de commencer l'album sans vouloir le terminer à tout prix), riche, varié, bénéficiant d'une production impeccable et d'un groupe au sommet de sa forme, il possède une sorte de charme qui saura faire mouche à coup sûr. On attend plus que le prochain et surtout que John n'ait pas la mauvaise idée de retourner avec ses ex-comparses.

The Omar Rodriguez Lopez Quartet, Sepulcros de miel, sorti le 30 mai 2010 en libre télchargement
Myspace

http://img7.hostingpics.net/pics/581995cover_OMAR_RODRIGUEZ_LOPEZ.jpg

Publié dans Musique

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