[Chronique]

Publié le par Métastases

Gorillaz - Plastic beach
par Domino
gorillaz-plastic-beachDepuis quelques temps, c'est la mode des reformations. Plus ou moins réussies, voire parfois carrément ratées, celles-ci laissent toujours un goût étrange dans la bouche. Parfois on se dit "mais pourquoi ont-ils attendu tout ce temps ?" parfois on se dit "mais pourquoi l'ont-ils fait ?". Concernant Gorillaz, qui nous avait laissés avec l'excellent Demon Days, la première écoute aurait eu de quoi faire écrire un manifeste contre les reformations. Mais c'est sans compter sur...

C'est sans compter sur la capacité du groupe à nous étonner, à nous intriguer à tel point qu'on ne peut se résoudre à écouter l'album une seule fois et le ranger sur l'étagère des "albums qu'on a attendus pour rien". Car cet album est une sorte de piège qui est loin d'être aussi en plastique qu'il semble être au premier abord. Plastic Beach, tel est son titre, est donc le troisième album des doux dingues de Gorillaz. Line up d'origine, si ce n'est une Noodle robotisée, univers plus ou moins intact mais davantage fourni, ce troisième album promettait sur le papier. Et pour cause quand on voit la liste d'invités, très impressionnante. Faisons les présentations : Snoop Dog, Kano, Bashy, L'Orchestre National de Musique Orientale Libanaise, Bobby Womack, Mos Def, De La Soul, Little Dragon, Mark E Smith, Lou Reed, et (quand même !) Mick Jones et Paul Simonon réunis ensemble et sans aucun clash pendant l'enregistrement ! Tout ça laisse rêveur, et amène une question : "mais comment ils vont gérer tout ça ?"

Une courte introduction teintée du bruit de la mer nous laisse deviner au loin la plage de plastique où les Gorillaz nous invitent, et c'est Snoop Dog qui nous y accueille, accompagné de l'Hypnotic Brass Ensemble. Snoop y pose un flow tout en maîtrise, le rythme nous faisant gentiment hocher la tête sans que l'on puisse voir le temps passer. Suit "White flag", titre très agréable rappelant les ambiances très world music du deuxième album de par la présence de l'Orchestre National de Musique Orientale Libanaise qui apporte la couleur idéale pour contraster avec le rap de Kano et Bashy. "Rhinestone eyes" est également une belle pépite voyant enfin apparaître le chant de 2-D, toujours aussi reconnaissable de par son côté nonchalant. Le morceau commence tout en douceur, soutenu de quelques nappes vaporeuses avant de laisser l'ambiance nous emporter loin, très loin. S'ensuit le single "Stylo", et sa boucle électro obsédante où viennent se greffer Mos Def et Bobby Womack (ainsi que Bruce Willis dans le clip video). Titre sympathique se laissant écouter, "Stylo" n'a néanmoins pas l'immédiateté de titres comme "Clint Eastwood" ou "Feel good inc.". "Superfast jellyfish" apporte lui une réelle dose de fun après cela, De La Soul et le refrain n'y étant pas étrangers.

Même si les titres s'enchaînent certes de jolie manière (à noter la participation sympathique de Lou Reed), on ne peut s'empêcher de se poser quelques questions. Où sont passées les constantes surprises des enchaînements de titres du premier album ? Où est passé ce petit truc qui nous faisait accrocher directement à chaque morceau du deuxième album ? Le groupe, gavé d'invités, n'aurait-il pas laissé sa musique tourner en roue libre, lui faisant perdre de sa personnalité au passage ? Il n'est pas aisé à la première écoute de faire ressortir des morceaux de l'album, tout semblant s'enchaîner sans réelle démarcation. Une petite déception s'empare alors une fois l'album terminé et, rangeant celui-ci sur la fameuse étagère citée plus haut, on se dit que tout cela aurait pu être plus grand, plus fort... A moins que...

A moins qu'on octroie une seconde chance à l'opus, et qu'on se lance dans une deuxième écoute. Et là tout semble se révéler comme si derrière la couche de plastique en évidence, se cachait une œuvre hautement plus profonde. Les premiers titres prennent une toute autre saveur, même "Stylo" devient évident. Un titre comme "Empire ants" qui n'avait pas marqué avant devient un moment de poésie délectable, d'autres morceaux de la trempe de "Glitter freeze" ou "On melancoly hills" semblent déjà des classiques. On se laisse aller sur les enthousiasmants "Sweepstakes" et "Plastic beach", et c'est touché par la profondeur sincère et inédite d'un "Cloud of unknowing" qu'on se laisse sortir de l'album, escorté par un "Pirate jet" du plus bel effet final.

Et en parlant d'effet, on peut terminer en mettant en garde tout potentiel auditeur de ce disque. Profitant d'un réel double voire triple effet, si ce n'est plus, il est à réserver aux amateurs de fouille sonore. Plastic Beach est une "prise de risque" qui se laisse savourer un peu plus à chaque écoute, à ne surtout pas juger à l'emporte-pièce puisque ce n'est que sur la durée qu'il devient, assurément, aussi indispensable que ses prédécesseurs.


gorillaz-plastic-beach.jpg
Gorillaz
, Plastic Beach, sorti le 8 Mars 2010 chez Virgin
Myspace

Article rédigé par Domino

Publié dans Musique

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article