[Chronique]

Publié le par Métastases

Sire Cédric - De fièvre et de sang
par Arno Mothra


sire cédric-copie-1Avec le succès public et critique mérité de L’enfant des cimetières, son premier thriller sorti début 2009 après plusieurs recueils de nouvelles, Sire Cédric a franchi une étape importante qui l’aura fait passer comme l’un des maîtres du genre en France. De fièvre et de sang, le petit nouveau, continue dans la même optique en émaciant néanmoins la touche plus fantastique et onirique de son auteur.

« Une jeune fille se réveille entièrement nue et entravée sur un matelas couvert de sang. Elle sait qu’elle va mourir, toute tentative de fuite semble inutile. La douleur n’est rien en comparaison de la peur panique qui s’est emparée d’elle…
Le commandant Vauvert mène l’enquête en compagnie d’une profileuse albinos, Eva Svärta. Personnage excentrique et hors norme, Eva a un véritable sixième sens qui fait d’elle une redoutable traqueuse de l’ombre. Ensemble, ils vont tenter de remonter la piste d’un tueur en série qu’ils croyaient mort et qui a pour habitude de vider entièrement ses victimes de leur sang. S’agit-il d’une réincarnation, d’un spectre, d’un homme, d’une femme, d’une créature d’un autre monde ? »

Eparpillant quelques références à L’enfant des cimetières (l’albinos, l’obnubilation d’une couleur [le rouge en l’occurrence], le commandant Vauvert), De fièvre et de sang achemine en terrain connu, hormis qu’ici l’action s’avère plus brute, voire brutale. Sire Cédric, dont la plume maîtrisée se reconnaît entre mille, ne se permet aucun compromis : l’intrigue est tenace, pas toujours originale dans les symboles qui la parcourt (loups, ombres) mais aboutie et entraînante. Elle tient le lecteur en haleine, jusqu’au bout. La première partie du livre se montre plus angoissante et tortueuse que les autres, nous replongeant dans une ambiance glauque typiquement nineties. Une réussite prenante et efficace, installant une ambiguïté qui ne fera que s’accroître.

À côté des rétrogradations dans les époques (la comtesse Elisabeth Bathory, les souvenirs d’Eva) et une ambivalence bien exploitées (la schizophrénie, les différences de situations), Sire Cédric s’essaie à traduire les évènements parsemant son récit dans un contexte moderne, ce qui peut tendre à se noyer complètement dans l’action ou, au contraire, à se révéler un peu rebuté par cet aspect « tendance goth ». Ce qui sera parfois un peu notre cas. Dommage en effet que l’auteur ait glissé des allusions assez appuyées au milieu gothique actuel (soirées électrodark, tenues en latex, Marilyn Manson), procédé plutôt convenu et cliché dans son contexte, même si cela contribue à s’immiscer au cœur d’une atmosphère contrastée, rétro et moderne.

Au-delà de ses petits défauts, pas bien encombrants, il faut admettre que De fièvre et de sang remplit bien son rôle de thriller, captivant, bien construit, qui tient en haleine et dont certaines images marquent l’esprit. On lui préférera toutefois l’originalité onirique de Dreamworld et de L’enfant des cimetières, indispensables, lesquels charment et terrorisent toujours autant lecture après lecture. Quoi qu’il en soit, Sire Cédric signe à nouveau un moment de littérature atypique et vivace qu’il serait regrettable de contourner.

 

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Sire Cédric, De fièvre et de sang, sorti le 18 mars 2010 chez Le Pré aux Clercs
Site
Myspace

Publié dans Littérature

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